Statistiques reliées aux absences de cadenassage sur les machines
Les machines industrielles sont reconnues pour avoir une multitude de risques (ISO 12100, 2010; CSA Z432, 2014; ANSI B11-TR3, 2000; Bluff, 2014). Les travailleurs interviennent sur les machines à différents stades de leur cycle de vie soit à l’installation, l’opération, l’entretien, le diagnostic, les réparations, les ajustements, les démarrages, les activités reliées à la production, le nettoyage et le démantèlement. Ce sont toutes des interventions lors desquelles le travailleur est exposé à des risques de coincement ou d’écrasement par exemple.
Les machines sont la cause de plusieurs accidents en milieu de travail comme le démontre les points suivants dans différents pays. Pour les années 2003 à 2010, 5 579 décès sont reliés aux machines aux États-Unis (Marsh et al., 2015). Le “Bureau of Labor Statistics” (BLS) aux États-Unis (BLS, 2014) a révélé un total de 717 décès qui sont reliés au contact avec des objets ou un équipement, en 2013. Le HSE en Angleterre, a indiqué que 50 % des accidents sont dus à des pièces en mouvement reliées aux machines et le résultat des presses à impression et des convoyeurs (HSE, 2006). Bulzacchelli et al. (2008) a rapporté que juste en 2005, 18 % des décès étaient reliés au contact avec des objets ou un équipement. Bellamy et al. (2007) a dévoilé que, chaque année, 400 accidents (21 %) annuellement aux Pays-Bas sont causés par le contact avec des parties en mouvement des machines. Gardner et al. (1999) a publié qu’en Australie, 28 % des blessures indemnisées sont attribuables aux machines. Gerberich et al. (1998) a rapporté que les machines agricoles ont été identifiées comme la principale source de blessures sans décès dans le milieu rural.
Chinniah (2015) a analysé 106 rapports d’accidents reliés aux pièces en mouvement sur des machines dans la province du Québec et au Canada. L’étude a montré que plusieurs accidents arrivent durant l’entretien ou durant les activités de production quand l’opérateur entre dans la zone dangereuse de la machine. Les dangers mécaniques sont présents tel que la rotation d’un arbre de transmission ou le démarrage soudain d’une lame rotative. Il a été mentionné que 12.3 % des accidents sont en lien avec les ajustements de la machine, 19.8 % des accidents sont durant les tâches de production, 34.9 % des accidents sont durant les tâches d’entretien et 31.1 % durant les tâches reliées aux problématiques de production (déblocage par exemple).
Les causes principales des accidents reliés aux machines est l’accès trop facile à la zone dangereuse à cause d’un manque de moyens de protection, de l’inexpérience des travailleurs, du contournement des moyens de protection, d’un manque d’analyse de risques, d’un manque de supervision, d’une mauvaise conception de la machine, de méthodes de travail dangereuses, d’instructions de travail inadéquates et de l’absence de procédure de cadenassage. (Chinniah, 2015; Backstrom and Doos, 2000; Bulzacchelli et al., 2008; Shaw, 2010; Blaise, 2010; Charpentier, 2005).
Aux États-Unis, environ 3 millions de travailleurs exercent des tâches d’entretien ou de service qui peuvent les exposer à des blessures graves, si les procédures de cadenassage ne sont pas appliquées adéquatement (U.S. Department of Labor, 2005). OSHA (Occupational Safety and Health Administration) a rapporté 4 149 violations de l’application de son règlement 1910.147 sur les procédures de cadenassage pour l’année 2000 sur un total de 17 478 inspections suite à des plaintes et de 41 832 inspections planifiées (OSHA, 2004). Le tiers des violations au règlement concernait l’absence de programme et/ou de procédure de cadenassage dans l’entreprise (Mutawe, 2002).
En 2005, le cadenassage a été la 5e cause d’incidents la plus citée dans les rapports de l’OSHA et 90 % d’entre eux sont dus au manque de procédure de cadenassage. Dans la majorité des cas (70 %), les procédures de cadenassage ne sont pas appliquées. Il est très rare qu’un décès survienne avec une application adéquate du cadenassage. La cause est alors une erreur humaine (5.2 %) ou une défaillance mécanique (1.2 %). Cette faible probabilité d’un décès suite à l’application adéquate du cadenassage tend à prouver l’efficacité du cadenassage.
Selon Nadeau et al. (2006), 10 % des accidents les plus graves en entreprises auraient pour source un manque de cadenassage. Shaw (2010) a revu 100 rapports d’accidents en Angleterre entre 2002 et 2007 et identifié une série de causes qui contribuent aux accidents. Parmi ces causes, l’absence de cadenassage est un des éléments majeurs. Blaise and Welitz (2010) ont répertorié, dans une base de données française EPICEA[1], que 88 accidents ont eu lieu durant un travail d’entretien en dehors des activités de production entre 1998 et 2007. L’étude rapporte que les opérateurs sont concernés puisqu’ils exécutent eux aussi des travaux d’entretien.
La répartition des accidents inclut un aspect organisationnel dans 69 % des cas correspondant principalement, au non-respect des procédures et en particulier celle reliée au cadenassage. Lind (2008) a analysé 33 rapports d’accidents en Finlande reliés à des accidents graves et mortels concernant l’entretien des machines industrielles. L’auteur a trouvé que le facteur organisationnel et les méthodes de travail dangereuses sont les causes principales d’accidents et recommande des méthodes de travail sécuritaires (cadenassage). Chinniah (2015) a rapporté que dans 33 accidents sur les 106 rapports d’accidents reliés à des parties mobiles sur des machines au Québec (Canada), les entreprises n’avaient pas de programmes ni de procédures de cadenassage ou ces derniers n’étaient pas appliqués lors des travaux d’entretien, de réparation ou lors du déblocage comme il est exigé par le Règlement sur la santé et la sécurité du travail au Québec (RSST). Selon le même auteur, dans 21 cas d’accidents, la procédure de cadenassage n’était pas appliquée durant les travaux d’entretien, de réparations ou de déblocage, malgré l’existence d’un programme de cadenassage. Dans 2 cas, un programme de cadenassage était existant mais il n’y avait pas de fiches de cadenassage en place pour la machine impliquée dans l’accident. Pour terminer, dans 2 accidents, la procédure de cadenassage était incomplète ou incorrecte.
En 2015 et 2016, 3 études de Parker et al. (2015a, 2015b et 2016) ont été publiées. Le premier article porte sur les programmes de sécurité dans l’industrie de l’acier (Parker et al., 2015a). Il en ressort que la fiche de cadenassage est seulement affichée sur la machine concernée dans 9 % des cas recensées dans 221 usines. La continuité du premier article porte sur la gestion de la sécurité sur les machines (Parker et al., 2015b). Plus l’entreprise a d’employés et plus le cadenassage est appliqué. Le dernier article de Parker et al. (2016) montre une nette amélioration de l’application du cadenassage suite au passage des consultants en contrôle des énergies dangereuses. L’amélioration a été notable en présence des procédures (fiches) de cadenassage avec 33 % comparé du 8 % auparavant, l’élaboration d’un programme de cadenassage par l’entreprise avec 76 % au lieu de 55 % et par la présence de points de coupures cadenassables avec 92 % comparé du 88 %.
Références
- International Organization for Standardization. Safety of machinery—General principles, ISO12100. 1st ed. Geneva. Switzerland; ISO, 2010.
- CSA Z432-04 (R2014), Safeguarding of Machinery, Canadian Standards Association.
- American National Standards Association. Risk Assessment and Safeguarding of Machinery Package, ANSI B11.TR3 (2000).
- Bluff E, Safety in machinery design and construction: Performance for substantive safety outcomes, Safety Science, Vol. 66, 2014, 27-35
- Marsh MS, Fosbroke DE. Trends of occupational fatalities involving machines, United States, 1992?2010. Am J Ind Med 2015;58(11):1160–1173.
- US Bureau of Labor Statistics. National Census of Fatal Occupational Injuries in 2013. Bureau of Labor Statistics, US Department of Labor; 2014.
- HSE. HSL/2006/83. Analysis of RIDDOR Machinery Accidents in the UK Printing and Publishing Industries 2003–2004. UK: Health & Safety Laboratory of the Health and Safety Executive; 2006.
- Bellamy LJ, Ale BJM, Geyer TAW, Goossens LHJ, Hale AR, Ohe J, Mude M, Bloemhofe A, Papazoglou IA, Whiston JY. Storybuilder – A tool for the analysis of accident reports. Reliab Eng Syst Safe 2007;92(6):735–744.
- Gardner D, Cross JA, Fonteyn PN, Carlopio J, Shikdar A. Mechanical equipment injuries in small manufacturing businesses. Safety Sci 1999;33:1–12.
- Gerberich SG, Gibson RW, French LR, Lee TY, Carr WR, Kochevar L, Renier CM, Shutske J. Machinery related injuries: regional rural injury study-I (RRIS-I). Accid. Anal. Prev 1998;30 (6):793–804.
- Bulzachelli M.T., et. al. Circumstances of fatal lockout/tagout related injuries in manufacturing. American journal of industrial medicine, 2008, Vol. 51, p 728-734.
- Chinniah Y., Analysis and prevention of serious and fatal accidents related to moving parts of machinery, Safety Science, 75, 163-173, 2015.
- Backstrom T, Doos M, Problems with machine safeguards in automated installation, International Journal of Industrial Ergonomics, 25, 2000, 573-585.
- Shaw S., Machinery accidents- Contributory factors, Proceedings of 6th International Conference on Safety of Industrial Automated Systems, 2010.
- Blaise J.C. et Welitz G., Operating on machinery out of production modes: principles and accidentology, Proceedings of 6th International Conference on Safety of Industrial Automated Systems, 2010.
- Charpentier, P., 2005. Safety of machinery: experience feedback on automatednaccidents from the EPICEA.
- US Department of Labor (2005). Bureau of Labor Statistics, National Safety
- OSHA 1910.147. Regulations Standards – 29 CFR, The control of hazardous energy (lockout/tagout), http://www.osha.gov/pls/oshaweb/owadisp.show_document?p_table=STANDARDS&p_id=9804
- Mutawe, A.M., Tsunehara, R., Glaspey, L.A.. (2002). OHSA’S lockout/tagout standards : a review of key requirements, Professional safety, Vol. 47, no. 2, p. 20-24.
- Nadeau, S., Charlot, E., Kenné, J.-P. (2006). Impact du contrôle du cadenassage sur les risques d’accidents et les coûts de production. Travail et santé, 22 (3), 49-52.
- Lind S (2008), Types and sources of fatal and severe non fatal accidents in industrial maintenance, International Journal of Industrial Ergonomics, Vol. 38, 927-933.
- Règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST/ROHS) (2014), RLRQ, c. S-2.1, r.13.
- Parker D-L, Yamin S-C, Brosseau L-M, Xi M, Gordon R, Most I-G, Stanley R (2015). National Machine Guarding Program: Part 1. Machine Safeguarding Practices in Small Metal Fabrication Businesses. American Journal of Industrial Medicine 58: 1174-1183.
- Parker D-L, Yamin S-C, Brosseau L-M, Xi M, Gordon R, Most I-G, Stanley R (2015). National Machine Guarding Program: Part 2. Safety Management in Small Metal Fabrication Enterprises. American Journal of Industrial Medicine 58: 1184-1133.
- Parker D-L, Yamin S-C, Xi M, Brosseau L-M, Gordon R, Most I-G, Stanley R (2016). Findings From the National Machine Guarding Program: A Small Business Intervention: Lockout/Tagout. Fast Track Article, Volume 58, Number 1: 61-68.
Note
[1] EPICEA est une base de données nationale anonyme et rassemblant plus de 18 000 cas d’accidents du travail graves et mortels ou significatifs en matière de prévention, survenus en France, depuis 1990, à des salariés du régime général de la Sécurité sociale.
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